![Pépé le putois [A]](https://petiteshistoiresdessciences.files.wordpress.com/2015/10/pepelepew_tcm142-16622.jpg?w=300&h=174)
Les composés soufrés
L’évacuation de FribourgEn 1889, la ville de Fribourg en Allemagne a connu une drôle de mésaventure. Des essais destinés à fabriquer la thioacétone ont donné naissance à une panique générale que le quotidien littéraire et politique français XIXe siècle, dans sa partie Petite Correspondance, explique [3] :
Il est bien certain que deux savants viennent de découvrir une substance douée d’une odeur si épouvantable que les inventeurs ont du renoncer à la préparer, devant la tempête de protestations et de plaintes des voisins de leur laboratoire dans un rayon de neuf cent mètres.
Ces chimistes expérimentant sur les dérivés de sulfures organiques, firent agir l’hydrogène sulfuré sur l’acétone et obtinrent, outre la trithioacétone, de petites quantités d’un composé défini, non volatilisé, cristallisé : C15H28S4.
En même temps il se forma un corps doué d’une si horrible odeur que l’éthylmercaptan et les autres sulfates sulfurés volatils, sont des parfums en comparaison à celui-là. Ces auteurs n’ont pas pu obtenir pur ce composé, mais ils supposent que c’est l’acétone monosulfuré (C3H6S).
En 1967, des chercheurs d’Esso dans le sud d’Oxford ont eu la témérité de rééditer cette expérience du craquage de la trithioacétone [1] :
Recently we found ourselves with an odour problem beyond our worst expectations. During early experiments, a stopper jumped from a bottle of residues, and, although replaced at once, resulted in an immediate complaint of nausea and sickness from colleagues working in a building two hundred yards away. Two of our chemists who had done no more than investigate the cracking of minute amounts of trithioacetone found themselves the object of hostile stares in a restaurant and suffered the humiliation of having a waitress spray the area around them with a deodorant. The odours defied the expected effects of dilution since workers in the laboratory did not find the odours intolerable…and genuinely denied responsibility since they were working in closed systems. To convince them otherwise, they were dispersed with other observers around the laboratory, at distances up to a quarter of a mile, and one drop of either acetone gem-dithiol or the mother liquors from crude thioacetone crystallizations were placed on a watch glass in a fume cupboard. The odour was detected downwind in seconds.
Pour les non anglophones, les chercheurs avoue avoir été devant une odeur au-delà de leurs pires prévisions. Au début des expériences, le bouchon d’un bidon a sauté et, bien qu’il ait été remis en place aussitôt, des collègues d’un bâtiment voisin de 200 yards (183 mètres environ) se sont plaints de nausées. Au restaurant, deux des chimistes qui avaient tenté l’expérience se trouvèrent humiliés par une serveuse qui répandit un aérosol désodorisant. Curieusement, les deux chimistes ne trouvaient pas les effets intolérables.
[1] Caltech University, Sulfur Faciliated Organic Synthesis, A. McClory, 2009 (en anglais),
[2] Wikipedia, William Christopher Zeise,
[3] Gallica, Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire, 1891-10-04,
[4] Chemie Im Alltag, Stinktiere und andere Mercaptogerüche, par Sven-Peter Fritz (en allemand),
[5] Chimie organique, Jonathan Clayden,Stuart Warren,Nick Greeves,Peter Wothers, page 4, 2002.
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Source image :
[A] Site Tomtom, Pépé le putois,
[B] Photo personnelle, Fumerolles à Kerlingarfjöll, Islande, 2011,
[C] Wikipedia, William Christopher Zeise,
[D] Chimie organique, Jonathan Clayden,Stuart Warren,Nick Greeves,Peter Wothers, page 4, 2002.
article amusant et intéressant
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