1800, Herschel découvre le rayonnement infrarouge

800px-William_Herschel01Astronome allemand, principalement connu pour sa découverte d’Uranus, il compose aussi de la musique qui a été récemment redécouverte. Cet autodidacte aux multiples vies est aussi le découvreur du rayonnement infrarouge. Cet astronome, c’est William Herschel qui ne vit pas en Allemagne mais en Angleterre où il s’est réfugié et est même devenu membre de la Royal Society.

Revenons sur les éléments de sa vie et de sa découverte du rayonnement infrarouge.
 Podcast

Après une première partie de vie consacrée à la musique, William Herschel se tourne vers l’astronomie. Sa renommée se fait instantanément après la découverte d’Uranus. S’il passe le plus clair de son temps à observer la Voie Lactée et à dénombrer étoiles doubles ou nébuleuses, il n’en est pas moins un homme pragmatique qui fait son argent en vendant des optiques et des télescopes. C’est lors d’une observation du Soleil qu’il se rend compte que la sensation de chaleur ressentie n’est pas la même en fonction de la couleur du filtre utilisé. Cette observation va l’amener sur la découverte des infrarouges… Herschel réalise alors une série d’expériences simples mais magnifiquement exécutées[1].

Pendant qu’un thermomètre est placé sur une des couleurs du spectre de la lumière du Soleil, deux autres servent de témoin. Ses résultats dans le rouge sont les suivants (en degré Fahrenheit) :

Mesures dans le rouge

Soit après 10 min, une élévation de température pour différentes couleurs :

Mesures pour 3 couleurs

À partir de ces données, Herschel estime avoir prouvé son hypothèse selon laquelle la chaleur serait distribuée de manière inégale selon les couleurs :

« Ce qui prouve seulement que le pouvoir chauffant des couleurs prismatiques est très loin d’être divisé également et que les rayons rouges sont principalement importants à cet égard. »[2]

illustration nasa
Credit: Troy Benesch ; site : Nasa https://science.nasa.gov/ems/07_infraredwaves

Quelque chose à propos des relevés de température le dérange. Il s’était bien attendu à ce que les lectures soient différentes pour les différentes couleurs mais les mesures révèlent une chose à laquelle il ne s’attendait pas : il y a une tendance à la hausse et non un pic dans le spectre visible. Si le maximum se situe en dehors du spectre visible, le chauffage ne provient pas de la lumière, mais de quelque chose d’autre. Herschel utilise l’expression «lumière invisible», en le formulant avec précaution de manière à indiquer qu’il sait qu’il s’agit d’un oxymore (si les rayons sont invisibles, ils ne sont pas éclairés). Il l’exprime :

« J’en conclus de même que le rouge vif n’atteint toujours pas le maximum de chaleur; qui peut-être même un peu au-delà de la réfraction visible. Dans ce cas, la chaleur rayonnante consistera au moins en partie, sinon principalement, si on me permet l’expression, de lumière invisible; c’est-à-dire des rayons provenant du soleil, qui ont un élan tel qu’ils sont impropres à la vision. »[3]

« Je dois maintenant faire remarquer que mes expériences précédentes démontrent hors de tout doute que la chaleur rayonnante, de même que la lumière, qu’elles soient identiques ou différentes, est non seulement réfrangible, mais est également soumise aux lois de dispersion. »[4]

9 jours seulement après ce premier article, et 10 jours avant qu’il ne présente ses travaux à la Royal Society, il écrit un deuxième article intitulé « Expériences sur la réfrangibilité des rayons invisibles du soleil »[5].

Mesure dans l'IRHerschel commence sa deuxième expérience en modifiant légèrement son dispositif pour prendre les mesures de température dans la zone sombre au-delà du rouge. Il trace cinq lignes parallèles espacées d’un centimètre sur une feuille de papier blanc, la première ligne se trouvant au bord de la bande de lumière rouge. Ainsi ancré au bord du visible, Herschel s’aventure dans les ténèbres. Il prend des mesures avec son thermomètre, en suivant la tendance à la hausse au maximum et au-delà, jusqu’à ce que la chaleur commence à diminuer. Le deuxième article de Herschel est empreint d’enthousiasme et de confiance dans ses conclusions.

« Pour conclure, si nous appelons la lumière, ces rayons qui éclairent des objets et la chaleur rayonnante, ceux qui chauffent des corps, on peut se demander si la lumière est essentiellement différente de la chaleur rayonnante? En réponse à ce que je suggérerais, les règles de philosopher ne nous permettent pas d’admettre deux causes différentes pour expliquer certains effets, s’ils peuvent être expliqués par une seule. »[6]

On retrouve là une économie de pensée propre  à la philosophie naturelle et la pratique expérimentale anglosaxonne développée par Francis Bacon et Isaac Newton.

Le troisième article[7] de Herschel propose sept comparaisons entre la chaleur lumineuse et la chaleur radiante. Au cours de plus de 200 expériences, il enregistre page après page des mesures en utilisant toutes les sources d’éclairage disponibles qu’il fait passer à travers différentes combinaisons de miroirs, de prismes et de lentilles. Il confirme à maintes reprises, de toutes les manières possibles, que la lumière et la chaleur radiante ont les mêmes propriétés optiques.


[1] Herschel, W. 1800. Investigation of the Powers of the Prismatic Colours to Heat and Illuminate Objects; With Remarks, That Prove the Different Refrangibility of Radiant Heat. To Which is Added, an Inquiry into the Method of Viewing the Sun Advantageously, with Telescopes of Large Apertures and High Magnifying Powers. Philosophical Transactions of the Royal Society 90:255–283.

[2] « The maximum of illumination lies in the brightest yellow, or palest green. The green itself is nearly equally bright with yellow; but, from the full deep green, the illuminating power decreases very sensibly. »

[3] « I likewise conclude that the full red falls still short of the maximum of heat; which perhaps lies even a little beyond visible refraction. In this case, radiant heat will at least partly, if not chiefly, consist, if I may be permitted the expression, of invisible light; that is to say, of rays coming from the sun, that have such a momentum as to be unfit for vision. »

[4] « I must now remark, that my foregoing experiments ascertain beyond a doubt, that radiant heat, as well as light, whether they be the same or different agents, is not only refrangible, but is also subject to the laws of dispersion arising from its different refrangibility. »

[5] Herschel, W. 1800. Experiments on the Refrangibility of the Invisible Rays of the Sun. Philosophical Transactions of the Royal Society 90:284–292.

[6] « To conclude, if we call light, those rays which illuminate objects, and radiant heat, those which heat bodies, it may be inquired, whether light be essentially different from radiant heat? In answer to which I would suggest, that we are not allowed, by the rules of philosophizing, to admit two different causes to explain certain effects, if they may be accounted for by one. »

[7] Herschel, W. 1800. Experiments on the Solar, and on the Terrestrial Rays that Occasion Heat; With a Comparative View of the Laws Which Occasion Them, Are Subject, in Order to Determine Whether They Are the Same, or Different. Part I and Part II. Philosophical Transactions of the Royal Society 90: 293–326 and 437–538


Programmation musicale :

  • Introduction : Antonin Dvorák, Symphony No. 9 en mi mineur (du Nouveau Monde), B. 178 (Op. 95), 1893, 1. Adagio – Allegro molto.
  • William Herschel, Symphonie n°2 en ré majeur, adagio ma non molto
  • William Herschel, Symphonie n°2 en ré majeur, allegro
  • William Herschel, Symphonie n°17 en do majeur, adagio ma non troppo
  • Ludwig von Beethoven, Symphonie n°1 en do majeur op. 21, andante cantabile con moto
  • Ludwig von Beethoven, Symphonie n°1 en do majeur op. 21, Adagio, allegro molto vivace

2 Replies to “1800, Herschel découvre le rayonnement infrarouge”

  1. En français on ne dit pas d’une personne qu’il fait son argent mais qu’il gagne sa vie ou bien qu’il gagne de l’argent en …
    Significatif à cet égard

    J’aime

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